lundi 29 avril 2024.

L’Evangile, message d’espérance.

Adveniat regnum tuum !

La bonne nouvelle.

Lorsque Jean eut été livré, Jésus vint en Galilée. Il prêchait l’Évangile de Dieu. Il disait : les temps sont accomplis, le Royaume de Dieu est proche ; réformez votre cœur et croyez à la « bonne nouvelle1. »

La « bonne nouvelle », c’est l’offre magnifique faite par Dieu à l’humanité ; c’est la révélation de l’amour infini du Père, qui permet à l’homme de devenir son enfant, lui donne de participer dès maintenant à sa vie et lui promet sa gloire pour l’éternité. Destinée magnifique, supérieure à tous les rêves humains, et que, de nous-mêmes, nous n’aurions pas faite aussi belle.

Supprimons un instant, par la pensée, ce livre si petit, mais si gros de conséquences, qu’on nomme l’Evangile, et demandons-nous alors ce que deviendrait notre vie…

Il prêchait l’Évangile de Dieu.

Jésus, descendu du ciel, est venu parler de ce qu’il a vu, porter à la terre un message d’espérance, « l’Évangile de Dieu ». Il en était temps, car le matérialisme du monde gréco-romain s’était infiltré jusque dans le peuple élu : on voyait les sadducéens, et parmi eux des prêtres, abandonner la croyance à une vie future.

Aujourd’hui encore, il serait grand temps que Jésus revienne sur la terre. Des milliers et des milliers de baptisés, dans les quartiers riches ou dans les faubourgs, vivent et meurent sans espérance, pour avoir rejeté l’Evangile de Dieu. Mais, Jésus ne reviendra plus en personne. Il revient, par le moyen de ses saints, des chrétiens à la vie pure et mortifiée qui montrent du doigt le ciel. De saintes âmes m’ont appris à espérer ; à mon tour d’annoncer par mes œuvres « la bonne nouvelle ».

Que ma vie devienne céleste, et elle constituera le meilleur témoignage rendu aux biens invisibles.

Ce n’est pas pour moi seul que j’ai reçu au jour du baptême la vertu d’espérance : elle me fut donnée comme une flamme destinée à en ranimer beaucoup d’autres.

Dieu de l’espérance, remplissez mon cœur de paix et de joie dans la foi, et montrez ainsi à ceux qui m’approchent qu’on peut trouver le bonheur dès ici-bas, à condition d’accepter sans réserve votre Évangile et de porter franchement votre joug.

Les temps sont accomplis.

Jésus répétait : les temps sont accomplis, ce qui voulait dire : « Si longue qu’ait semblé l’attente, Dieu, qui est la bonté et la fidélité même, n’oubliait pas ses promesses. Dieu ne peut pas oublier ses promesses. Ce qu’il a promis, même une seule fois, il le tient. Vous en voyez aujourd’hui la preuve : votre rédemption est proche, car déjà au milieu de vous se trouve le Rédempteur. »

Les Juifs attendaient le Messie promis à leurs pères ; il est là qui leur parle.

J’attends le règne de Dieu promis par le Christ, je l’appelle de tous mes vœux, je ne fais autre chose que le demander ; il est déjà en moi, je dois le croire. Il y est par la vie divine reçue au baptême ; il y est par la foi, par l’espérance et par l’amour. Mais, son mystérieux accroissement — Dieu le veut ainsi — échappera à ma connaissance.

J’y aspirerais moins si je pouvais le voir ; je me relâcherais dans la prière si je sentais ce que je possède aussi vivement que ce qui manque.

Bientôt, dans la synagogue de Nazareth, Jésus dira : « L’Esprit du Seigneur est sur moi parce qu’il m’a consacré par l’onction. Il m’a envoyé porter la bonne nouvelle aux pauvres, annoncer aux captifs la délivrance et aux aveugles la vue, remettre en liberté les opprimés, publier une année de grâce de la part du Seigneur2. »

Et, il conclura par ces simples mots : « Aujourd’hui cette Ecriture s’accomplit à vos oreilles. »

Méditons ces paroles, comprenons qu’elles sont dites pour nous et sachons y découvrir les deux grands motifs d’espérance, toujours les mêmes : la miséricordieuse bonté du Père céleste, qui se penche avec une tendresse particulière sur ceux qui souffrent3, et sa toute-puissance secourable, engagée par ses promesses.

Nous ignorons évidemment quand s’accomplira le temps de notre entrée dans le royaume de gloire, mais pour ce qui concerne le Règne de Dieu, la venue spirituelle du Christ dans nos âmes, l’accroissement de salut que donne tout progrès dans la foi, l’espérance et la charité, il est manifeste, — l’Église nous le redit chaque année durant l’Avent, — que les temps sont accomplis.

Le désirons-nous ardemment, ce règne tout intérieur ?

Il n’y a espérance que s’il y a désir. Croyons-nous de toute notre âme aux promesses du Père céleste ? Savons-nous les lui rappeler, à notre prie-Dieu, avec non moins de simplicité que de respect ?

Il faut nous souvenir aussi que l’espérance est une vertu infuse, un don du Très-Haut qui ne s’acquiert point à force d’étude et de réflexion, mais qui s’obtient du ciel par une humble et constante prière, se développe par l’exercice et s’accroît merveilleusement au banquet eucharistique.

Dieu tout-puissant et éternel, unique espérance du monde, daignez accomplir les promesses faites par votre Fils et augmentez dans nos cœurs la foi à votre parole, l’espérance des biens futurs et l’amour de votre saint Nom, car il ne se fait, sans votre inspiration, aucun progrès dans les vertus4.

Le Royaume de Dieu est proche.

Le Royaume.

C’est tout l’objet de notre espérance.

 « Un bout de paradis arrange tout, aimait à répéter le Bienheureux Cafasso. Travaillons ! nous nous reposerons au ciel ».

À considérer son aboutissement, le Royaume est une demeure dans la maison du Père5, un lieu de délices où Jésus nous prépare une place6, où le serviteur entrera dans la joie de son maître7.

Le royaume de gloire sera un jour la récompense de ceux qui auront accepté ici-bas le règne de Dieu8, lequel s’ébauche par la pénitence et se perfectionne par le développement des vertus chrétiennes. Le Royaume, tel que Jésus l’annonce au début de sa prédication,

« n’est pas un Paradis tout fait qui va descendre d’En-Haut, tout d’un coup… C’est une grâce faite à la terre et une puissance à elle donnée de s’élever vers un état céleste.
La naissance du Royaume est un fait silencieux, sans éclat, tout intime, le fait d’un Dieu qui condescend et qui vient aider, et le fait d’hommes qui correspondent à l’avance divine, et décident librement de vivre selon les volontés de Dieu et de gagner ensuite leurs frères à cette même vie9 ».

Le Royaume se rapproche pour qui croît davantage, pour qui espère davantage, pour qui progresse dans la charité. Autrement dit, nous devons recevoir l’Evangile, nous devons coopérer à la grâce.

Jésus, Dieu Sauveur, faites que je comprenne et désire votre Royaume !
Jésus, Dieu Sauveur, faites que je reçoive comme un enfant votre Royaume10.
Jésus, Dieu Sauveur, faites que je consacre ma vie à l’extension de votre Royaume !

Le Royaume est proche.

En quel sens ? Il est proche de deux manières :

Le paradis est proche si je compare son éternité au laps de temps qui m’en sépare. Tout nombre, si grand soit-il, devient petit en comparaison de l’infini.

Le Royaume est proche, si je l’entends, de toute effusion de la grâce qui prépare le cœur de l’homme au règne de Dieu et lui ménage par le fait l’héritage, céleste. Bien des grâces me seront offertes au cours de la journée qui commence : oraisons, sacrements, exemples d’âmes pures, charitables, attachées à leur devoir.

Mais, je peux ressembler au figuier stérile11 et rendre vaines les avances de Dieu. En ce sens, il dépend de moi que le Royaume se rapproche ou qu’il s’éloigne.

« Depuis les jours de Jean-Baptiste jusqu’à présent, a dit Jésus, le royaume des cieux se prend de force, et les violents s’en emparent12 ».

Le Royaume est donc proche à la manière d’une terre promise que le Christ me fait admirer et qu’il m’invite à emporter de hautes luttes. Le Royaume est proche si je suis décidé à collaborer à la grâce. Il est loin si je suis lâche. Le Royaume était proche de Zachée et de la femme pécheresse ; il était loin du jeune homme pur, mais attaché à ses richesses. La question, pour l’heure, n’est donc pas précisément de se présenter au Christ avec un passé immaculé, mais de recevoir d’un cœur simple tout son message, d’accomplir la volonté du Père et d’être prêt à porter sa croix chaque jour.

Le Royaume est proche de maint petit scout des faubourgs, et il est loin, hélas, de certaines âmes consacrées à Dieu.

Ô Dieu, qui avez préparé des biens invisibles à ceux qui vous aiment, répandez dans nos cœurs la tendresse de votre amour, afin que, vous aimant en toutes choses et par-dessus toutes choses, nous obtenions un jour ces biens que vous nous avez promis et qui surpassent tous nos désirs. Par J.-C. N.-S13.

Poenitemini et credite evangelio.

Faites pénitence et croyez à la bonne nouvelle.

Réformer son cœur

Faire pénitence, ici, c’est réformer son cœur, c’est en éliminer tout ce qui fait obstacle au règne de Dieu. Rappelons-nous la prédication de S. Jean-Baptiste au Jourdain.

Dans cette méditation, je rechercherai plus particulièrement quelles sont les affections désordonnées qui s’opposent en moi au désir et à l’espérance des biens éternels.

Croire à la « Bonne Nouvelle »

Pour réformer mon cœur, il me faut, en premier lieu, « croire à la Bonne Nouvelle », y croire vraiment, du fond du cœur, considérer le ciel comme ma patrie et y penser quelquefois. Il me faut croire pleinement au don magnifique — grâce et gloire — que m’apporte le Christ, l’estimer plus que tout au monde14, le désirer avec ardeur, croire que chaque renoncement consenti pour Jésus sera payé au centuple15, et dire enfin avec les saints, en face de toute jouissance particulièrement séduisante :

Quid hoc ad aternitatem ?

Éliminer les désordres de l’esprit

Réformer son cœur, c’est encore éliminer tout ce qui s’appelle découragement, lâcheté, mollesse. L’espérance chrétienne est une vertu non de repos, mais de combat ; elle est beaucoup moins une récompense qu’un principe de force et de patience. Qui dit espérance ne dit pas seulement confiance, mais aussi effort généreux et persévérant vers les biens d’en haut.

« L’espérance, dit le Catéchisme catholique16, ne se manifeste pas seulement par les paroles, mais par les œuvres, lorsque, plein de confiance dans les promesses divines, nous supportons avec patience les difficultés et les peines de cette vie, voire les persécutions. »

Éliminer les attachements désordonnés

Il faut enfin éliminer de son cœur l’attachement aux richesses, la recherche exagérée du bien-être et des commodités, car tout cela énerve le courage, colle l’âme à la terre et l’empêche de penser au ciel.

Méditons à ce sujet les paroles prononcées par Jésus à propos du jeune homme riche, lorsqu’il le vit partir tout triste :

« Oh ! qu’il est difficile à ceux qui sont riches, s’exclama-t-il, d’entrer dans le royaume de Dieu ! Il est, en effet, plus facile à un chameau de passer par le trou d’une aiguille qu’à un riche d’entrer dans le royaume de Dieu. »

Ceux qui l’écoutaient dirent : « Alors, qui peut être sauvé ? » Il répondit : « Ce qui est impossible aux hommes est possible à Dieu17 ».

Espérance et pauvreté en esprit vont de pair.

Dans la mesure où nous nous détachons de la terre, dans la même mesure, nous nous élevons vers le ciel.

Comprenons bien que le grand obstacle au salut, ce n’est pas le fait d’avoir des richesses, mais d’y coller son cœur. On peut ne rien posséder et être riche, riche par le désir, riche par le souci et la préoccupation d’acquérir. C’est de la sorte que Judas devint riche18, tandis que Zachée se montra pauvre en esprit tout en gardant une partie notable de sa fortune19.

Ô Dieu, qui êtes le protecteur de ceux qui espèrent en vous, et sans lequel il n’y a rien de ferme, ni de saint : multipliez sur nous vos miséricordes, afin que, sous votre loi et votre conduite, nous passions de telle sorte par les biens temporels que nous ne perdions pas les biens éternels. Par J.-C. N. S.20


Lectures pour nourrir vos méditations


Notes & Références

Sujet d’Oraison pour tous les jours de l’année, Tome III, « Temps après la Pentecôte » — Vie Publique de Jésus — Enseignements et Miracles, P. J.-B. Gossellin, S.J., 2ᵉ édition revue et augmentée, Apostolat de a prière, Toulouse, 1940, p.50-58.

  1. Mc. I, 14, Evangile signifie bonne nouvelle.
  2. Luc IV, 18-19.
  3. Juxta est Dominus iis qui tribulato sunt corde…
    Iahvé est près de ceux qui ont le cœur brisé, il secourt ceux dont l’esprit est affligé (Ps. XXXIV, 19) On pourrait appeler les psaumes la « prière de l’espérance » : confiance, désir, espoir, voilà les sentiments qui reviennent partout.
  4. Cf. Samedi-Saint, XIIè prophétie, oraison
  5. La plus belle exhortation sur l’espérance, c’est celle que le Christ en personne donna à ses Apôtres, peu avant de mourir : que d’invitation à la confiance, que de motifs d’espérer dans le « discours après la Cène » !
  6. « Il y a beaucoup de demeures dans la maison de mon Père ; s’il en étai autrement, je vous l’aurais dit, car je vais vous y préparer une place. » Jean XIV, 2.
  7. « Son maître lui dit ; C’est bien, serviteur bon et fidèle ; parce que tu as été fidèle en pue de choses, je t’établirai sur beaucoup : entre dans la joie de ton maître. » Matt. XXV, 21.
  8. Certains exégètes traduisent ainsi le verset 15 de saint Marc : « Le règne de Dieu est proche. »
  9. A. Letoussey, L’Évangile, règle de vie, p. 115.
  10. « Je vous le dis, en vérité, quiconque ne recevra pas comme un petit enfant le royaume de Dieu, n’y entrera point. » Marc X, 15.
  11. Il dit aussi cette parabole : « Un homme avait un figuier planté dans sa vigne ; il vint pour y chercher des fruits, et n’en trouvant point, il dit au vigneron : Voilà trois ans que je viens chercher du fruit à ce figuier, et je n’en trouve point : coup-le-donc : pourquoi rend-il la terre improductive ? Luc XIII, 6-7.
  12. Matt. XI, 12.
  13. Oraison du 5° dimanche ap. la Pentecôte.
  14. « Et que sert à l’homme de gagner le monde entier, s’il vient à perdre son âme ? Ou que donnera un homme en échange de son âme ? » (Matt. XVI, 26)
  15. « Et quiconque aura quitté des maisons, ou des frères, ou des sœurs, ou un père, ou une mère, ou une femme, ou des enfants, ou des champs à cause de mon nom, il recevra le centuple et possédera la vie éternelle. » Matt. XIX, 29.
  16. Q. 525
  17. Luc XVIII, 18-27.
  18. « Il dit cela, non qu’il se souciât des pauvres, mais parce qu’il était voleur, et qu’ayant la bourse, il dérobait ce qu’on y mettait. » Jean XII, 6.
  19. L’orgueil satisfait s’oppose lui aussi à la bonne Nouvelle. Il met l’homme en possession du plus grand des biens terrestres et fait qu’on ne cherche pas ailleurs le bonheur qu’on croit tenir pour longtemps.
  20. III dim. après la Pentecôte

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