Le Christ — Mon fils, tu ne dois ni reculer, ni te décourager en m’entendant te révéler la voie des parfaits, mais plutôt être attiré vers cette voie sublime, et tout au moins y aspirer en la désirant.
Ah ! s’il en était ainsi pour toi, et si tu en arrivais à ne plus t’aimer toi-même, mais à t’en tenir uniquement à ma volonté, et à celle du supérieur que je t’ai donné,
Alors, tu me plairais grandement, et toute ta vie se passerait dans la paix et la joie.
Tu as encore beaucoup de choses à quitter ; et si tu ne me les sacrifies pas entièrement, tu n’obtiendras point ce que tu désires1.
Beaucoup désirent la contemplation, mais sans s’appliquer à en remplir les conditions.
Le grand obstacle vient de ce qu’on s’arrête aux apparences et aux choses sensibles ; et qu’on cherche peu à se mortifier parfaitement…
…Les contemplatifs sont rares, parce qu’ils sont rares ceux qui savent s’affranchir pleinement des créatures périssables2.
La grâce de la dévotion, il te faut la chercher instamment, la désirer ardemment et l’attendre avec confiance patiemment ; la recevoir avec reconnaissance, la conserver humblement, y coopérer diligemment, et, jusqu’à ce que Dieu vienne, t’en remettre à lui du temps et du mode des visites célestes…
Souvent Dieu donne en un instant ce qu’il a refusé bien longtemps.
Quelquefois, il donne, à la fin de l’oraison, ce qu’il n’a pas donné au début.
Si la grâce était toujours donnée, aussitôt que demandée, ce ne serait pas sans danger pour notre faiblesse.
Aussi est-ce dans une espérance ferme et une humble confiance qu’il nous faut attendre la grâce de la dévotion.
Cependant n’en accuse que toi et tes péchés, lorsque la grâce ne t’est pas donnée ou même t’est retirée sans motif apparent.
Il suffit parfois de peu de chose pour empêcher la grâce ou nous la dérober, si toutefois il est permis d’appeler peu de choses, et non un grand mal, ce qui empêche un si grand bienfait.
Mais, si tu écartes cette chose petite ou grande, et si tu en triomphes parfaitement, il te sera fait comme tu l’as demandé3.
Je te l’ai souvent dit, je te le dis encore : quitte-toi toi-même, renonce-toi, et tu jouiras d’une grande paix intérieure.
Donne tout, pour trouver tout ; ne cherche rien, ne réclame rien ; tiens-toi uniquement et résolument en moi, et tu me posséderas4.
Le Seigneur, en effet, se plaît à enrichir les âmes, quand il les trouve vides d’elles-mêmes.
Plus quelqu’un renonce parfaitement au monde et plus, il meurt à lui-même en se méprisant, plus vite aussi vient la grâce, plus elle entre abondamment, et plus elle élève haut le cœur libéré5.
Pour aller plus loin…
- “Imitation de Jésus-Christ”Livre III “De la vie intérieure”, 31. Qu’il faut oublier toutes les créatures pour trouver le Créateur.
- “Imitation de Jésus-Christ”Livre IV “Du sacrement de l’Eucharistie”, 15. Que la grâce de la dévotion s’acquiert par l’humilité et l’abnégation de soi-même.
- Notre Dossier : Conseils pratiques pour l’oraison.
Notes & Références
Sujet d’Oraison pour tous les jours de l’année, Tome I, Conseils pratiques pour l’oraison — La Très Sainte Trinité — Les perfections divines — La Grâce — Les fins dernières”, P. J.-B. Gossellin, S.J., 2ᵉ édition revue et augmentée, Apostolat de a prière, Toulouse, 1938, p.1-9.
- “Imitation de Jésus-Christ”Livre III “De la vie intérieure”, 32. De l’abnégation de soi-même., 2. ↩
- “Imitation de Jésus-Christ”Livre III “De la vie intérieure”, 31. Qu’il faut oublier toutes les créatures pour trouver le Créateur., 3 et 1. ↩
- “Imitation de Jésus-Christ”Livre IV “Du sacrement de l’Eucharistie”, 15. Que la grâce de la dévotion s’acquiert par l’humilité et l’abnégation de soi-même. , 1-2. ↩
- “Imitation de Jésus-Christ”Livre III “De la vie intérieure”, 37. Qu’il faut renoncer entièrement à soi-même pour obtenir la liberté du cœur. , 4. ↩
- “Imitation de Jésus-Christ”Livre IV “Du sacrement de l’Eucharistie”, 15. Que la grâce de la dévotion s’acquiert par l’humilité et l’abnégation de soi-même., 3 ↩
