dimanche 28 avril 2024.

Prières inspirées 3/4 : Prière d’Anne, Mère de Samuel

Il y avait une femme, nommée Anne, épouse de Phenenna, qui était stérile. Anne partit un jour afin de prier le Seigneur à Silo.

Héli, le (grand) prêtre, était assis devant la porte du temple… L’âme pleine d’amertume, (Anne) pria lahvé et versa beaucoup de larmes.
Elle fit un vœu en disant : « lahvé des armées, si vous daignez regarder l’affliction de votre servante… et si vous lui donnez un enfant mâle, je le consacrerai à lahvé pour tous les jours de sa vie… »

Comme elle restait longtemps en prière devant lahvé, Héli observa sa bouche. Anne parlait en son cœur et remuait seulement les lèvres, sans que sa voix se fit entendre.

Héli pensa (donc) qu’elle était ivre et il lui dit : « Jusques à quand seras-tu dans l’ivresse ? Fais passer ton vin. »
Anne répondit : « Non, mon seigneur ; je suis une femme afligée dans son cœur ; je n’ai bu ni vin ni boisson enivrante, mais j’épanchais mon âme devant Iahvé… »
Alors Héli lui dit : « Va en paix, et que le Dieu d’Israël exauce (ta) prière !… »

Anne, ayant conçu, enfanta un fils qu’elle nomma Samuel1.

Saint Jean Chrysostome trouva ce passage si beau qu’il consacra plusieurs homélies à le commenter.

Résumons quelques-uns de ses développements.

Importance de la prière.

Que cette femme soit votre modèle : recourons sans cesse à Dieu, allons à lui dans nos afflictions, demandons-lui toutes choses, car rien n’égale la prière : c’est elle qui rend facile ce qui était ardu, possible ce qui était impossible… Cela ne peut arriver, non, cela ne peut arriver qu’un homme qui prie avec l’empressement qui convient et implore Dieu sans cesse, tombe jamais dans le péché…

Comment prier ?

Que veulent dire ces mots : Comme elle restait longtemps en prière ?… Le Christ a dit : Vous, quand vous prierez, ne parlez pas beaucoup, à la manière des paiens, qui s’imaginent être exauces à force de paroles…

Mais par ailleurs, m’objectera-t-on, Jésus n’a-t-il pas employé une parabole, celle de la veuve qui demande justice, pour nous faire comprendre qu’il faut prier sans cesse ?

Saint Paul na’t-il pas dit : Priez sans relâche !2

Aucune contradiction en cela : le Christ a voulu nous faire entendre que ce qui nous vaut d’être exaucés, c’est la vigilance de l’âme et non l’abondance des paroles. Saint Paul, comme Jésus, veut que nous fassions, à intervalles rapprochés, de courtes et fréquentes aspirations…

Anne arrêta le mouvement de ses lèvres, pour obéir au prêtre, mais sa confiance ne s’arrêta pas, mais son cœur se mit à crier avec plus de force encore qu’auparavant. C’est là en effet la plus vraie des prières, lorsque le cri monte vers Dieu du fond de nous-mêmes : prier n’est pas affaire de ton et d’organe, mais d’âme et d’ardeur. Ainsi priait Moïse : « Pourquoi cries-tu vers moi ? » lui dit un jour lahvé, à un moment où ses lèvres restaient fermées…

Où prier?

Et qu’on n’objecte pas qu’on est loin

de l’église : pourvu que nous restions tempérants, la grâce du Saint-Esprit fait de nous les temples de Dieu, en sorte que nous avons partout tout ce qu’il faut pour prier. Pour nous, ce n’est pas chose compliquée comme pour les Juifs, qui devaient monter à Jérusalem, acheter une tourterelle, avoir en mains le bois et le feu du sacrifice… Ici, rien de pareil ; vous êtes vous-mêmes et le prêtre, et la victime, et l’autel… Dieu se préoccupe fort peu de l’endroit d’où l’on prie, il ne réclame qu’une chose : la ferveur du cœur et la droiture de l’âme…

La femme qui tient sa quenouille, ou qui tisse peut diriger son esprit vers le ciel et invoquer le Seigneur avec ferveur. L’homme qui voyage, qui se trouve au forum, peut prier avec attention ; le commerçant à son comptoir, le serviteur dans sa cuisine peut élever son cœur vers Dieu.

Je ne vous dis pas tout cela pour que vous applaudissiez, mais pour que vos prières et vos supplications montent vers Dieu le jour et la nuit ; et même durant votre travail.

Effets de la prière.

Revenons aux paroles de cette femme (sa réponse à l’interpellation injurieuse du prêtre), pleines de sagesse et de mansuétude… D’un accusateur elle se fait un avocat : telle est la force de la modestie et de la douceur. Anne s’en va, emportant une magnifique récompense pour l’insulte reçue : elle a trouvé un intercesseur et un protecteur en celui qui la déshonorait3.


Pour aller plus loin…


Notes & Références

Sujet d’Oraison pour tous les jours de l’année, Tome I, Conseils pratiques pour l’oraison — La Très Sainte Trinité — Les perfections divines — La Grâce — Les fins dernières”, P. J.-B. Gossellin, S.J., 2ᵉ édition revue et augmentée, Apostolat de a prière, Toulouse, 1938, p.115-117.

  1. I Samuel 1 (Premier livre des Rois)
  2. I Thess. V, 17.
  3. Homélies III et IV sur Anne, Migne, P.G. tome LVI, col. 666, 646 ; 667, 668 ; 651.

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