mercredi 24 avril 2024.
 

Lecture pour le Mercredi des Cendres

Les institutions de l’Église, comme toutes les œuvres de Dieu, sont variées à l’infini.

Cette tendre Mère possède, avec l’amour qui la dévoue à nos besoins, une rare intelligence pour les deviner et un véritable génie pour les satisfaire.

  • Elle se réjouit avec le juste,
  • s’humilie avec le pécheur,
  • gémit avec la veuve,
  • pleure avec l’orphelin,
  • mendie avec le pauvre.

Son culte, ses chants, ses cérémonies saisissent l’homme par toutes les facultés de son âme et tous les sens de son corps ; à tout prix, elle veut pour triomphe la conviction de notre esprit et l’amour de notre cœur. C’est pourquoi elle se fait toute à tous pour nous gagner tous à Jésus-Christ.

Quelquefois cependant, confondant :

  • les riches et les pauvres,
  • les grands et les petits,
  • les savants et les ignorants,
  • les princes et les sujets,
  • les prêtres et les simples fidèles,

dans une même pensée, elle donne à tous, dans une même langue, une même leçon. Tel est le spectacle qu’offre aujourd’hui à nos regards la touchante cérémonie des Cendres.

Il y a quelques jours, un prédicateur, précédé par une brillante réputation, nous était annoncé, et nous remplissions le Temple Saint.

Oh ! L’admirable prédicateur, le sublime sermon que celui d’aujourd’hui dans les temples catholiques !… 

Mais qui va parler ?

La chair de vérité est vide et muette.

Je vois le prêtre lui-même, confondu au milieu de la foule recueillie, s’incliner et humilier son front.

Qui parle donc ?

La poussière ! Un peu de cendre !

Mais, cette cendre n’est qu’une interprète ; elle nous traduit une langue, la langue de la mort !

Toute chose a une fin conforme à son origine.

Ce qui vient de Dieu retourne à Dieu ; ce qui est de la terre retourne à la terre.

Qu’étaient, en effet, ces cendres que l’Église répand aujourd’hui sur nos fronts ?

Des branches de palmier et des rameaux de laurier.

Pleins de sève et de verdeur, ils furent choisis, l’an dernier, pour servir à la fête qui porte leur nom, la fête des Rameaux. Mais, leur triomphe ne fut que d’un jour ; vite ils se sont flétris, leurs feuilles se sont décolorées et ont perdu leur suave odeur, le feu a achevé de détruire ce que le temps avait pu leur laisser encore ; maintenant, ils sont poussière. Autrefois, ils formaient ensemble, un pesant faisceau de verdure ; aujourd’hui, un petit enfant porterait la cendre qui reste d’eux dans le creux de sa main ! La terre les avait produits, c’est à elle qu’ils retournent. Oh ! L’expressive leçon !

La transformation de ces rameaux sera la nôtre bientôt.

Tout florissant de santé et jeunesse que puissent être notre corps, d’où sont-ils ? De la terre ! Où vont-ils ? À la terre !

Voilà ce que les cendres prêchent éloquemment à tous ceux qui les reçoivent aujourd’hui…

Le monde, tous ces jours, disait à l’homme, dans son langage flatteur :

Souviens-toi de la noblesse de ton sang, de l’illustration de ta famille, songe à l’éclat de ta fortune, au luxe de tes équipages, à la magnificence de ta demeure, à des distinctions, à ces plaisirs qui courent en foule au-devant de toi, à ces talents de l’esprit qui te promettent tant de succès, à cette fleur de jeunesse et de beauté qu’il te donne en spectacle à tous les regards. 

Et, l’homme, séduit par ces paroles, invitait son âme à se réjouir, à se divertir à la vue de toutes ces richesses ; requiesce, comede, bibe, epulare !

En ce jour de pénitence, l’Église, avec un peu de cendre et quelques mots, mais sublimes, mais effrayants de vérité, rend la raison à cet homme atteint du délire qui donne l’orgueil :

Ô homme ! Souviens-toi que tu n’es que poussière et que tu retourneras à la poussière.

Memento !

Il est vrai que Dieu a placé dans cette maison de boue, qu’on nomme le corps humain, une hôtesse immortelle, l’âme.

Mais, l’âme n’y vivra pas toujours ; le corps n’est pour elle que la tente d’une nuit, comme la tente que le pasteur replie, quasi tabernaculum pastorum1. « L’esprit passe en lui, dit le psalmiste, mais sans s’y arrêter. »

Oh ! allons donc tous entendre en ce jour la muette, mais éloquente prédication des cendres bénites. Allons recueillir les leçons salutaires de l’Eglise : en nous entretenant de l’abaissement futur de nos corps, elle nous fera comprendre

— et la brièveté du temps

— et la fragilité de la vie,

— et la dignité de nos âmes immortelles,

— et les charmes de la vertu,

— et la beauté admirable du Dieu qui en sera la récompense.

Là, dans ces leçons de l’Église, est toute la sagesse, toute la morale, toute la conduite de la vie ; là, malgré une apparente sévérité, est le secret du bonheur lui-même ; là, surtout, est le salut. Memento !

L’abbé L.


Pour aller plus loin…

Billet dominical « la Septuagésime »

Billet dominical « la Sexagésime »

Billet dominical « la Quinquagésime »

Billet dominical « 1ᵉʳ dimanche de Carême »

Billet dominical « 2ᵉ dimanche de Carême »

Billet dominical « 3ᵉ dimanche de Carême »

Billet dominical « 4ᵉ dimanche de Carême »


Messe du Jour

Mercredi des Cendres


Notes & Références

Semaine Religieuse de Bayeux, 1865, p.17-18.

  1. Isaïe 38, 12 « … comme une tente de bergers… »

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